dimanche 18 septembre 2011

L’automne et le retour du silence



L'automne, quand s'apaise l'effervescence

L’automne est la saison de l’air. L’Air, c’est la psyché, l’ensemble des émotions et des sentiments. C’est ce qui nous porte vers les choses, pour ou contre elles, ce qui nous meut dans le plan des sentiments. L’Air est l’expression de ce qui se ressent, le monde de l’émotion. Il faut passer par l’air pour accéder à l’esprit, cet esprit qui est le feu du centre de la terre, du cœur de l’hiver. Le Feu qui est mental et qui suppose indubitablement la Sagesse. Le Feu qui est Savoir, cet apogée de l’homme. L’Air est égal à oser. C’est cette capacité de courage, que nous inspire l’Archange Michaël, le maître de l’automne, l’assistant et le protecteur de Dieu; c’est plus qu’une force, c’est un élan, une foi. Oser, précisément, c’est ne pas entretenir la peur, c’est se lancer parce qu’on est conscient qu’on doit à tout prix arriver à la Sagesse. Qu’on y aspire passionnément. L’air a besoin d’espace. Pour circuler. Pour purifier. Il a besoin des vides à remplir. Le silence a aussi besoin d’espace. L’espace entre nos pensées, l’espace entre nos paroles, l’espace entre nos effervescences. 

Les grands connaisseurs des secrets de l’âme humaine connaissaient bien la valeur du silence. Pythagore, comme bien d’autres maîtres-penseurs, exigeait de ses disciples cinq années de silence; on appelait cette étape le stade acousmatique. Wow ! Vous rendez- vous compte ! Cinq ans ! Alors que nous avons du mal à faire silence, vraiment silence, ce que certains appellent la méditation, quinze minutes par jour. Ce silence n’était pas considéré comme une torture mais comme une grâce, un cadeau extraordinaire à se faire dans une vie. Et il était essentiel pour apprendre les rudiments de l’écoute. L’écoute du dehors comme l’écoute du dedans. Celle qui fait qu’on entend éventuellement ses vrais besoins, ceux qui se sont vus enfouir sous des tonnes de poussières émotionnelles et mentales.

Quand on n’écoute plus attentivement, on passe son temps à demander des choses, sans même vérifier aux sources si on les veut vraiment. On en perd le sens de la différence qu’il y a entre nos désirs et nos besoins. Quand on apprend d’abord le silence, on apprend ensuite bien plus efficacement tout ce qu’il y a à apprendre de valable. Par l’expérience du silence dans lequel l’esprit pénètre à certains moments, la prise de conscience confirme que tout est sacré, que tout s’accomplit. Le mental devient silencieux, et ce qui est goûté là est indescriptible. Dans le silence, nous commençons à développer en nous cette porosité à la Présence. Cette ouverture de tout l’être nous rend perméables à l’essentiel. Nos sens deviennent alors des antennes, les antennes du vivant et non pas des tentacules qui tentent de tirer le monde à eux pour le posséder.

Il y a un moment ineffable de silence entre la fleur et la semence. Un moment où du silence de soi, de sa nature, vient à la fleur la réalisation de la nécessité d’interrompre son mouvement d’extase et d’offrande, de dissolution dans le cosmos, pour assurer la survie des générations suivantes. Dans ce silence tient toute la vérité de la conscience de soi. Quand le contact s’établit avec une réalité aussi Divine, ce n’est pas comme si un maître parlait à son élève, mais comme si l’âme s’écoutait enfin. Prendre conscience, c’est se recueillir pour écouter et l’on ne prend jamais mieux conscience qu’en se taisant, en laissant l’Aoum chanter en soi. Ce silence, on le ressent le matin, au jardin, quand le froid recommence à sceller les urgences, à rappeler les priorités, à inverser le mouvement dissipé. 

L’air se remplit d’intentions.

La synthèse, ce retour à l’essentiel, s’installe dans les formes qui nous entourent. Les feuilles fondent ou sèchent, les tiges se durcissent, laissant échapper la vitalité fluide qui leur a permis le développement et la montée vers la lumière. Les fleurs disparaissent ou se figent un peu, se font moins vibrantes, prennent de l’âge alors qu’elles contemplent la mission de céder place aux graines. Les insectes n’ont jamais été plus présents. Ils sont le feu qui précipite la matière vers son essence.

Ce silence, on le ressent autour de soi. On le ressent en soi. Naît alors un immense besoin de se rapatrier, de se récolter, de remettre sa vie à l’ordre, de s’occuper de soi, de se préparer à porter fruit par une action centrée et paisible, ancrée dans la nature profonde de notre être. On décide alors de consacrer plus de temps à sa vie intérieure. Quand on le choisit, le temps vient à la rescousse et ouvre l’espace pour le vivre. « Le Temps, cette image mobile de l’immobile éternité ». (J.-B. Rousseau) 

Et alors, finalement, on se permet de respirer. L’air nous comble. L’automne est là. On contemple. On se re-pause de l’été. On peaufine nos semences avant de les confier à la terre vivante de l’hiver, si chaleureuse en son cœur, en son Noël des mondes. On s’offre du temps pour aimer, avant même de chercher à combler notre immense soif de savoir. Il faut changer l’ordre des choses, une fois encore.

Je veux prendre le temps, cet automne, d’écouter les questions qui montent en moi sans m'acharner à leur trouver des réponses. Je veux faire confiance. Tout vient en son temps. 

1 commentaire:

Anonyme a dit...

Merci Danièle de venir ainsi par ces paroles empreintes de tendresse, de sagesse me rappeler au silence intérieur et m'inviter ainsi à reprendre ma respiration dans cet espace de paix de confiance et d'amour